mercredi 23 novembre 2011

La quatrième option

Cette lettre a été envoyée à certains directeurs des études touchés par la révision en cours du programme Arts et lettres. Nous espérons que ce point sera discuté à une prochaine réunion du CAP le 24 novembre. (CAP :Commission des affaires pédagogiques: c'est la réunion de tous les directeurs des études du réseau)
Mais elle s'adresse aussi à tous les directeurs des études, à tous les enseignants d'un programme Arts et lettres et par le fait même aux étudiants actuels et futurs de ce programme.


Objet :             Surspécialisation dans la formation en art.
                        Arts et lettres est un programme qui permet la diversité.
                        La soustraction d’arts visuels représente un appauvrissement du programme.

En tant que professeurs dans les disciplines  «arts visuels»,  en tant que coordonnateurs de programmes Arts et lettres et en tant qu’artistes, nous croyons important de souligner notre inquiétude face aux futurs changements proposés par le Ministère. (1)

La révision du programme Arts et lettres demeure nécessaire. La révision proposée par le MELS répond à plusieurs correctifs demandés. Mais la proposition du MELS pose problème parce qu’elle agit sur deux niveaux ; le premier qui réorganise le programme sous 3 options (5) ; et le deuxième, qui fait disparaître dans la même foulée l’option arts visuels. (2)  
À peine mentionnée, comme si c’était une intervention mineure, cette soustraction évacue rapidement toute discussion sur les différentes approches dans la formation en art, mais aussi sur la place de l’art dans la société.

Faire disparaître un profil n’est pas un simple changement de structure, c’est l’abandon d’une certaine vision qui exige un débat plus ouvert et plus inclusif de ses participants et acteurs principaux.  La connaissance par l’apprentissage de l’art n’est pas seulement une technique et ne saurait se résumer qu’à une utilisation des médias. C’est une attitude et un regard qui doit traverser la société.

Il semble que le MELS ; s’appuyant sur un commentaire venant des universités nous offre l’apparence d’un dédoublement de formation avec le programme Arts plastiques (futur Arts visuels) ; crée un parallèle sous-entendu avec des formations (déjà exclues d’Arts et lettres) comme la danse et la musique (qui sont des arts d’interprétation) ; réfléchit selon une grille unique et restrictive, bref que le MELS propose une surspécialisation très restrictive des apprentissages de l’art d’expression sans laisser de portes ouvertes à d’autres types de formations plus générales et des approches locales.

Le MELS oublie-t-il que la bidisciplinarité et la multidisciplinarité sont aussi des genres, que ces pratiques mixtes ou transdisciplinaires sont de plus en plus courantes en art contemporain, que l’étude de l’art ne peut être que théorique (comme il est suggéré de le faire pour résoudre le problème de la disparition du profil  arts visuels ) ? (1)



Tous les étudiants au secondaire n’ont pas reconnu au secondaire la forme d’art qui les passionne; que ce soit la danse, les arts graphiques, la photographie, la musique, le théâtre, la littérature, la scénographie ou les arts plastiques. Certains ont encore trop peu de connaissance dans le domaine des arts, le secondaire ne les ayant que peu allumés. Certains s’intéressent à l’art sous toutes ses formes sans pouvoir en choisir une seule. Ils veulent se donner encore un peu de temps et/ou se donner plus d’expériences. Les étudiants du profil arts visuels et ses équivalents sont différents et ceux qui croiraient à un transfert automatique de ces étudiants vers Arts plastiques (futur Arts visuels) sont soit mal informés sur les pratiques des arts visuels actuels ou sont dans l’illusion.
Dans certaines régions, les formations spécialisées en art sont soient absentes ou d’un autre type. Une quatrième option plus générale, plus multidisciplinaire, plus ouverte sur des pratiques mixtes représente souvent une solution à considérer.

Le processus de révision qui est en cours laisse peu de place à la représentation d’arguments partisan du maintien de ce profil ou partisan de l’ajout d’une quatrième option (tel que votée le 15 avril lors de la réunion du comité d’enseignantes et d’enseignants du programme). (6) (7)
D’autre part, comment peut-on réfléchir au développement de contenu
s’il n’y a aucun représentant des arts visuels au comité de révision !!!
En fait, le MELS ayant annoncé que trois représentants « des diverses disciplines du programme d’étude » seraient choisis «si les candidatures reçues le permettaient », il est évident qu’avec les 3 options du MELS, une des options serait absente : les arts visuels. Facile de croire que le Comité pourrait avoir un regard incomplet sur la question d’une quatrième option.

Cette exclusion dans la proposition du MELS et dans la constitution du comité de révision nous laisse dubitatifs et insatisfaits quant à l’avenir d’une certaine formation en art. Étant exclus et ignorants de ce qui se discute actuellement, nous craignons de nous retrouver le 17 février devant le fait accompli. Les questions subsistent.

·      Pourrait-on nous expliquer la logique qui exclut les arts visuels du programme arts et lettres ?
·      Le ministère cède-t-il à la pression des universités (qui offrent une interprétation partielle des faits) quant à la réussite des élèves en arts visuels ?
·      Si l’évaluation de la quatrième option est sérieuse, n’aurait-il pas été justifié et impératif que des représentants d’arts visuels y soient nommés?
·      Qu’adviendra-t-il des étudiants qui souhaitent découvrir le monde de la création par une formation plus générale ?
·      Avec la disparition du profil arts visuels, vient également la disparition d’un certain nombre de postes de professeurs. Tous ne seront pas recyclés dans d’autres postes ou redirigés vers d’autres CEGEP en Arts plastiques. Qu’adviendrait-il d’eux ?

Compte tenu de la baisse de fréquentation du profil arts visuels et généralement en Arts et lettres, une réforme s’avère pertinente. Nous souhaitons donc en être partie prenante. Nous croyons qu’Arts et lettres peut être bonifié, que la quatrième option pourrait bénéficier d’une augmentation du nombre d’heures contacts et de certaines compétences intéressantes en ajoutant plus de cours de création.  Toutefois, nous contestons cette nécessité inexpliquée que le programme Arts plastiques devienne la seule formation en art pour les arts médiatiques, les arts visuels ou les arts graphiques ou tout simplement pour la création visuelle et multidisciplinaire.

Le 17 février prochain, les résultats de cette révision nous seront présentés. Il est possible qu’une quatrième option soit alors incluse dans la proposition du Comité de révision et ultimement du MELS, mais il est aussi fort possible qu’elle soit écartée et que nous soyons devant le fait accompli. (3)

Si le processus semble avoir été respecté, la transparence du processus ne l’a pas été. Vérifiez autour de vous pour voir combien de direction d’études, combien de coordonnateurs de programme ou de département en Arts et lettres ou en art sont au courant de qui attend leur programme ou leur profil.

En foi de quoi, nous voulons être mis au courant dans les meilleurs délais des changements prévus. Nous souhaitons également qu’une quatrième option soit incluse dans la réforme Arts et lettres et qu’elle permette une formation pratique en arts visuels. Nous souhaitons également qu’un représentant de l’option arts visuels soit nommé au comité de révision.
Il nous apparaît de la plus grande importance que le MELS, le comité de révision Arts et lettres et les directeurs des études prennent acte de nos inquiétudes, qu’ils répondent à nos questions et voient à ce que la voix des enseignants en arts visuels soit entendue au sein du comité. Nous ne saurions attendre d’être mis devant un fait accompli. Les enjeux nous apparaissent trop importants.

Gilbert Boyer
CP Arts et lettres, enseignant en arts visuels CEGEP Bois-de-Boulogne, artiste

Bertrand Carrière
CP Arts et lettres, enseignant en arts visuels, CEGEP André-Laurendeau, artiste

Harlan Johnson
CP Fine arts (Arts plastiques), enseignant en arts visuels, CEGEP Dawson, artiste
ex Coordonnateur du profil arts visuels en Arts et lettres 



Voici en annexe quelques citations pour se rafraîchir la mémoire. 

1  «Le programme Arts et lettres révisé, dans sa finalité, préparera à la poursuite d'études universitaires dans les domaines des arts et des lettres, à l'exception des arts plastiques, de la musique et de la danse. Les profils en arts visuels pourront continuer d'exister sous le programme révisé, mais ils mettront davantage l'accent sur l'étude et l'analyse du domaine; les objectifs révisés permettront le développement d'un niveau technique qui ne sera pas suffisamment élevé pour la poursuite d'études universitaires en arts plastiques. » ( p.3 Compte rendu de la 15e réunion du comité d’enseignantes et d’enseignants du programme d’études préuniversitaires arts et lettres (500.a1) réunion tenue le vendredi, 15 avril 2011)


2  «… il ne sera plus possible d’offrir de profils en arts visuels dans le cadre du programme révisé. M. Picard précise de son côté que cette décision ne relève pas du groupe de travail ayant effectué l’analyse comparative et ayant formulé des recommandations concernant la structure du programme, ni du Comité-conseil, mais qu’il s’agit bien d’une orientation retenue par le Ministère.»  (p. 3 du Compte rendu de la 15e réunion)

3  « Le programme révisé devrait être approuvé au cours du printemps 2012. Le programme serait d'application facultative pour l'année 2012-2013 et d'application obligatoire pour l'année 2013-2014. (p.5 du même document)

4  «Le MELS ne finance pas l'implantation de programmes d'études révisés, à l'exception des équipements et des immobilisations pour les programmes techniques. Les collèges financent l'implantation en utilisant les fonds à leur disposition.» (p5 du même document)

5  «Les nouvelles options proposées sont au nombre de trois et s’intitulent, provisoirement, Langues, Arts et médias et Arts et littérature. L’option Langues couvrirait les profils en langues; l’option Arts et médias couvrirait, par exemple, des profils en cinéma, médias, journalisme, télévision et théâtre-interprétation; l’option Arts et littérature couvrirait, par exemple, des profils en littérature et en théâtre-littérature. Les options Arts et médias et Arts et littérature se distingueraient ainsi : la première faisant davantage appel à un travail collectif et en action, la seconde davantage à un travail individuel et à l’écrit.»

6  «Cela dit, l’assemblée ne réussit pas à s’entendre sur les titres des options, mais une entente semble se cristalliser autour de quatre options (ajout d’Arts d’expression). Dans cette optique, des participants manifestent une inquiétude de ne plus pouvoir offrir un profil combinant deux disciplines. On leur répond que cela restera possible. (p.4)

7  Le 15 avril, certains représentants de programme réagissent et exposent leurs craintes. Il en ressort une motion qui est appuyée, à la majorité «Il est proposé de recommander au comité de révision d’étudier une nouvelle division des options au nombre de quatre (4) afin de mieux rendre compte de la distribution des disciplines au sein des options en tenant compte des appellations évoquées lors de la rencontre du 15 avril 2011. (p.4)



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